L'histoire du village

D’où vient le nom du village d’Ibos ?

Il est une tradition qui fait dériver Ibos de deux mots latins, I, bos (va, bœuf) et encore n’est-on pas tout à fait d’accord sur le fait qui donna naissance à la tradition. Voici celui qui est adopté le plus communément : Jules César, dit-on, aurait donné ce nom de localité en l’entendant prononcer en leur langage par des bouviers qui cultivaient la plaine : « Ha, boéu » (va, boeuf) d’où Ibos…

Selon d’autres, César se serait adressé à un paysan à qui il aurait posé certaines questions. Le paysan ne comprenant pas ou ne sachant répondre regardait le conquérant. « I, bos » (va, bœuf) lui aurait dit César impatienté. Et aussitôt il aurait donné le nom de Ibos à la localité…

Le mot Ibos, (Y bos) pourrait être formé du préfixe Y (pour in) et de Bos nom patois de « bois » (dans le bois). Car Ibos a été jusqu’à une époque très récente, environné de bois de tous côtés.

Ce que nous connaissons de son histoire

Ibos était au Moyen-Age l’une des villes maîtresses ou chef de bailliage (chef lieu composé de 30 à 40 villages) ou de Quarton que comptait la Bigorre soit : Tarbes, Bagnères, Lourdes, Vic, Rabastens et Ibos. Comme telle, elle possédait une cour comtale. C’était une ville marcadale remarquable par ses foires et ses marchés.

La ville d’Ibos ne changera jamais mais sera martyrisée dans son histoire. Le premier village était un enclos ecclésial organisé aux XIe et XIIe siècles. C’était un regroupement de l’habitat dans l’espace sacré qui entoure l’église et l’originalité de ce village, c’est l’agrandissement à partir de ce point central d’où le poids de la pensée religieuse du village au cours des temps. L’urbanisation d’Ibos est unique en Bigorre avec son mode d’occupation de l’espace qui semble avoir été dessiné au sol en 1050.

La commune d’Ibos s’étend sur 3288 ha et est plus étendue que Tarbes 1512 ha. Situé face à la majestueuse chaîne des Pyrénées, le vaste territoire d’Ibos se compose de deux éléments géographiques complémentaires :

A l’ouest, débordant sur le plateau de Ger longtemps couvert de landes, il attira le premier peuplement humain du site qui renferme des tumulus protohistoriques ou tombes bâtis en dômes avec des galets et de la terre au-dessus – ou non – des foyers d’incinération des corps. Contemporain de ces tumulus se dresse un oppidum protohistorique portant une motte féodale. On parle de « Castéra » qui signifie lieu fortifié. Grâce à la découverte d’amphores, l’oppidum peut être daté du Ier ou IIe siècle. Puis, à l’époque romaine les gens sont descendus dans la plaine. Le site de l’oppidum a été utilisé à nouveau au Moyen-Age, où l’on a édifié une motte féodale désignée « Tumulus de Castéra » ; lors de la construction de l’autoroute A64, des fouilles ont permis de retrouver des vestiges de ces époques : poterie, urnes funéraires, fibules, bijoux…(qui sont aujourd’hui conservés au Musée d’Aquitaine à Bordeaux).

A l’est, une large terrasse alluviale de la vallée de l’Adour qui du haut de ses 320 m d’altitude domine de dix mètres le site de Tarbes. Comptant les meilleurs sols de la commune, elle a joué un rôle vital pour une économie d’autosuffisance vivrière à base de polyculture. C’est ici que s’est construit le noyau médiéval autour de son église, délimité par des rues concentriques, tracé hérité des fortifications disparues et à partir duquel rayonnent les voies qui relient Ibos aux autres communes.

La position stratégique d’Ibos à la frontière du Béarn et aux portes de Tarbes n’est sans doute pas étrangère au fait que Centulle III, comte de Bigorre et vicomte de Marsan érigea Ibos en commune et lui octroya une charte de franchise et de privilèges vers 1171, afin de permettre à ses habitants de devenir possesseurs définitifs de leurs maisons, de se gouverner eux-mêmes et de se défendre contre les brigands qui infestaient le pays. Dès lors, deux consuls d’Ibos eurent droit d’entrée aux Etats de Bigorre où le Tiers-Etat comptait seulement vingt-neuf représentants.

Une assez grande partie de l’agglomération était défendue par des murailles et constituait ce que certaines vieilles chartes appellent « le Château » (castellum ville ou enceinte fortifiée).

Ibos était un enclos ecclésial organisé aux XI-XIIe siècles. Le regroupement de l’habitat était dans l’espace sacré entourant l’église d’origine plus petite que celle d’aujourd’hui où il était interdit de s’attaquer à qui que ce soit. C’était un espace de vie et de mort puisque le cimetière était dans ce périmètre. On est à l’époque enterré en pleine terre à côté de sa maisonnette ou dans l’église.

Ce noyau primitif est bâti sur un sol sablonneux qui permet à l’eau de s’infiltrer évitant ainsi les inondations.

Le puits pour l’eau potable, profond en briques soigneusement maçonnées sur quatre niveaux, est creusé à la limite du premier enclos au XVe siècle.

 

En 1285, Ibos est dénommé castrum et villa. L’église, dédiée à Saint-Laurent, était fortifiée et entourée de défenses hautes et solides qu’elle conservera jusqu’en 1594. Un portail devait se situer à l’est et peut être un deuxième sur la place qui était celle du marché (un marché tous les quinze jours) et de deux foires annuelles (à la Saint-Jacques et à la Sainte-Catherine) en vertu de privilèges donnés par le comte.

A partir de ce moment, la population et par suite la prospérité d’Ibos s’accrurent rapidement et considérablement. Aussi, lorsque le Roi Edouard 1er (1239-1307) Roi d’Angleterre, maitre d’une partie de la Gascogne ordonne à son sénéchal Jean de Grailly de se saisir de ce Comté, ce dernier déclare que tous les privilèges des habitants d’Ibos seront respectés.

En l’an 1300, Philippe IV le Bel, mari de Jeanne de Navarre,  récupère la suzeraineté du Comté de Bigorre et confirme la charte en 1301.

En 1304, ce même souverain accorda d’autres privilèges importants, entre autres la suppression des trois cents sols Tolosa (monnaie de Toulouse) à verser tous les ans à cause des dommages que les ennemis leur avaient causés.

Cette enceinte renfermait deux cents feux (foyers) et deux cent quarante sept feux fiscaux (chefs de famille payant des taxes au comte) en 1313. Les habitants étaient nombreux (Tarbes et Bagnères comptaient 8oo habitants en 1300) ce qui explique en partie la taille de l’église.

Tous les privilèges accordés à la communauté d’Ibos sont confirmés en 1340 par le Roi Philippe VI de Valois (1328-1350) et en 1377 par le roi Charles V (1364-1380) moyennant un abonnement annuel au représentant du Roi d’une somme de mille francs d’or (monnaie de Paris) à titre d’abonnement amiable pour l’ensemble des redevances communales.
A cette époque, il y eu aussi un différend entre la communauté d’Ibos et l’Ordre des Templiers établit à Bordères. L’ordre du Temple (1129-1312) était un ordre religieux et militaire dont les membres étaient appelés les Templiers. Il œuvra pendant les XIIe et XIIe siècles à l’accompagnement et à la protection des pèlerins en route pour Jérusalem dans le contexte de la guerre sainte et des croisades. Il participa aux batailles lors des croisades et de la reconquête. Afin de mener à bien ses missions, il constitua à travers l’Europe chrétienne d’Occident et à partir de dons fonciers, un réseau de monastères appelés Commanderies. En sus du village de Bordères, il leur donna la plus grande partie du territoire de Juillan dans lequel certains habitants d’Ibos possédaient aussi quelques terres. Ce fut la source de nombreux conflits entre la commanderie de Bordères et la communauté d’Ibos.

En 1370 sous le règne du roi de France Charles V (1364-1380) et pendant la guerre de Cent ans, Ibos redevint anglaise. Durant cette période, Jean de Grailly connétable d’Aquitaine pour le roi d’Angleterre confirma les privilèges et leur en attribua d’autres. Tout cela avait pour but de tenir et fortifier le village aux mains des Anglais.

L’historien régional Guillaume Mauran (1575-1640) parle des restes des fortifications d’Ibos en ces termes : « Les marques des fossés et les ruines des murailles qui subsistent encore montrent assez qu’il y a eu cy devant quelques forteresses bien garnies et peuplées. Même il est probable que les comtes de Bigorre ont fait état de cette ville pour la défense des frontières puisqu’ils ont donné de beaux privilèges, d’abord en janvier 1304, par Philippe IV roi de France et comte de Bigorre, ensuite, en considérant des dommages soufferts pendant les guerres, tout le territoire occupé avec permission de le partager moyennant un fief annuel de 300 deniers de Tolose, (Monnaie frappée à Toulouse) ».

Les habitants d’Ibos eurent à défendre à plusieurs reprises le maintien de leurs franchises et privilèges contre le pouvoir royal et à résister à l’augmentation de leurs redevances et impôts divers.

En 1569, l’église a beaucoup souffert du passage du Comte Gabriel de Montgomery qui blessa Henri II dans un tournoi et qui à la mort du Roi se mit au service de Jeanne d’Albret et devint l’un des principaux chefs des Huguenots.

En 1575, une armée de protestants logea dans la ville qui sauva temporairement son église par le paiement d’une rançon de 1600 livres. Mais à leur retour, les mêmes mirent le feu à l’église ainsi qu’à une douzaine de maisons.

En 1592, ce sont les ligueurs qui se retranchent solidement dans l’église et se rendent maîtres de presque tout le pays. Ils restent deux ans dans la citadelle d’Ibos et ils en furent chassés par Philippe de Montaut, baron de Bénac qui après avoir délogé la garnison de l’église en fit abattre la voûte pour leur ôter tout lieu de retraite en cas de retour.

Pendant toutes ces périodes, Ibos a beaucoup souffert et a cessé de se développer. Au XVIIe siècle, la ville d’Ibos avait perdu tous les ornements qui décorent une ville, n’ayant plus aucune foire, ni marché hormis le nom de ville qui lui est resté. Dés lors, la ville d’Ibos a vécu dans une profonde quiétude si l’on excepte l’incendie de 1868 qui aurait détruit les trois quarts des toitures en chaume du village. Par son nom, la rue brûlée rappelle cette catastrophe.

Les XVIII et XIXe siècles seront deux périodes florissantes pour le village. Beaucoup de maisons datent de cette époque. De grands travaux ont été entrepris par Le docteur Lacoste (maire de 1851-1893), nommé par décret impérial sous Napoléon III et élu ensuite par les concitoyens. Il entreprend de grands travaux (lettre de M. Laburie maire d’Ibos de 1928 à 1936 qui lui rend hommage). Dans le village que nous retrouvons aujourd’hui, beaucoup de travaux datent de cette période, dont voici quelques éléments :

Restauration de l’intérieur de la collégiale après remise en état de l’extérieur (à partir de 1856).
Embellissement de la place publique en bordant le Mardaing canalisé de parapets en pierre de taille.
En 1876, destruction de l’abattoir pour le remplacer par la mairie que nous connaissons aujourd’hui. Cette belle bâtisse dont l’ossature est faite de blocs d’Arudy, est en fait une belle demeure Bigourdane.
Conservation et extension de ses forêts en faisant planter chaque année de nouveaux arbres.
A l’angle de l’ancienne place du marché se tient la halle à usages multiples qui a été restaurée en 1896.

 

L’architecture bigourdane

L’architecture bigourdane dont l’originalité n’est pas assez connue est très présente à Ibos :

  • Les toits pentus à coyau et couvertures d’ardoise avec lucarnes à capucine ou à abside polygonale selon la tradition du XVIIIe siècle.
  • Les magnifiques encadrements de portes et de fenêtres en pierre de taille et au linteau souvent en arc de cercle et en anse de panier datent des XVIIe et XVIIIe siècles.
  • Les boiseries des portes sont parfois sculptées.
  • Les portails monumentaux montraient la richesse de la maison. Leurs vantaux (battants) en bois étaient surmontés d’un toit qui les protégeait de la pluie.
  • La disposition particulière des communs ou bâtiments de ferme par rapport à l’habitation principale.

De nos jours, des normes sont fixées à tout restaurateur de vieilles maisons ou à tout constructeur pour conserver au village son unité architecturale dans un rayon de 500m autour de la collégiale.

Le village a une forme circulaire autour de sa Collégiale.

La Collégiale

L’église d’Ibos, que les voyageurs découvrent avec admiration des lieues à la ronde, témoigne par sa structure originale d’un riche passé. Elle a été classée monument historique en 1862.

Deux rues sont disposées en cercles concentriques autour de celle-ci.
Le premier espace autour de l’église et du cimetière a un rayon de 37 mètres et ne comptait que 4 maisons au début de XVe siècle. La rue a remplacé le fossé qui protégeait le premier enclos médiéval.

Le second espace circulaire d’extension plus récente est lui même encerclé par une rue de 85 mètres de rayon. Les maisons sont accolées et le bourg rassemblait 43 maisons en 1429.

L’abside très élevée, bien au dessus du toit de la nef, et surmontée d’un clocheton en forme d’éteignoir, ressemble à une tour énorme et résulte d’une reconstruction menée au milieu du XIVe siècle, pour qu’y trouve place le collège de prêtres prébendés que venait de fonder en 1342 Philippe VI de Valois. L’église reçut alors le titre de « Collégiale ». Les églises collégiales étaient des églises avec un culte dont l’importance et la fréquentation exigeait un clergé spécial plus nombreux que celui des églises ordinaires et qui ressemblait au culte des cathédrales. Elles possédaient un chapitre de chanoines sans en avoir un siège épiscopal.

La nef, partie la plus ancienne unique et caractéristique du style gothique languedocien, date de la fin du XIVe siècle. Sa base est plus ancienne que l’abside. Profonde de trois travées et privée de bas-côtés, elle est accompagnée de six chapelles latérales ogivales et est éclairée par deux étages de petites fenêtres en plein cintre aujourd’hui transformées en vitraux. La voûte large, modérément élevée à 15m50, est sillonnée de nervures croisées, retombant sur modillons et se relève à chaque travée comme dans la Cathédrale de Tarbes.

Pour en savoir plus, voir la rubrique Patrimoine.

Le blason de la ville d’Ibos

La ville d’Ibos avait bien évidemment ses armes
  • Une croix cantonnée de 4 i. (La croix fait allusion à la Collégiale).
  • Les couleurs rouges (couleur des lions des comtes de Bigorre).
  • Les couleurs fond d’azur (couleur de la maison de France).
  • Les quatre initiales de la ville maîtresse « mestressa villa » sont dorées.
Ses couleurs furent définies aux XIe et XIIe siècles
  • L’écu est encadré par deux branches de feuillage, celle de dextre est fruitée, celle de senestre non fruitée.
  • Vous pouvez voir ce blason sculpté dans la pierre, au dessus de la porte d’entrée de la Mairie.